The Punisher de Mark Goldblatt (1989)


THE PUNISHER de Mark Goldblatt

New Worlds Pictures - 1989 - Affiche promotionnelle Japonaise

Oui. Il est certain que la carrure huilée d’un Dolph Lundgren alors en pleine expansion de ses muscles et de sa carrière aux confins des navets interstellaires éveillera le rire des moins vaillants d’entre vous. Une fois ce gentil rire nerveux stoppé, la lecture pourra commencer.

Bien avant le défilé de ces méprisantes stars aux vannes malaisantes que sont les Avengers vint un film Marvel. Le tout premier du nom. Curieusement oublié.


Pour les fanas un peu moins hardcore de cinéma genresque qu’il puisse exister, un nom revient de toutes les discussions bisseuses de bistro. Roger Corman. Roger, c’est le type qui ne te promet pas les montagnes, les sommets, la thune, les femmes et la coke. Et pas autour d’un verre de whisky 79 ans d’âge. Mais plutôt de travailler la matière autour d’une 8.6. Et en soit, il ne te ment pas. Roger ne te mentira jamais (il l’a peut-être fait mais c’est objectivement pardonné). Les montagnes ? Tu pourrais aussi les gravir, mais seulement à son échelle. Et son échelle ne culmine pas non plus des masses. Pourtant qu’on le veuille ou non reste le mastodonte de son genre. A tel point que son nom est accolé à plusieurs centaines de productions Américaines entre les années 50 à…aujourd’hui à plus de 90 ans. Ah et il ne te paiera peut-être pas la bière non plus.

Aucun sous titre nécessaire


Le style Corman et de son entreprise NEW WORLDS est né de son incroyable aura pour produire des films dont seul lui conserve le secret. Produire un cinéma bis pour de ridicules budgets, le tout accompagné d’une communication visant à séduire les plus candides d’entre vous qu’ils sont face au dernier Star Trek – la folle aventure de l’espace -. Ou; face au dernier Jurrasic ParkCarnosaur c’était lui -. Enfin, face au dernier film de super héros tendance. Devinez qui.

Sa méthode de production est constamment la même : reprendre des films à gros budgets pour en réaliser des bisseries. Tendres et attachantes. Cette méthode devint caricatural au possible à travers le temps ; pompé dès lors par d’atroces magnats avec Asylum productions en tête ou cette merde faussement nanardesque de Sharkado. Pourtant le style de Corman n’a jamais été – du moins en son temps – de promouvoir une merde, mais de donner vie à un film fait avec ses moyens, ses idées et sa lourde passion quasi pathologique du cinéma. En autre, Corman est aussi connu pour avoir repéré et surtout aidé des types tels que Coppola, Cameron, Jonathan Deeme, Jack Nicholson ou même l'incroyable auteur Robert Towne (avec son unique et réel film d'auteur The Last Woman On Earth!) Tous auront fait leurs armes auprès de Corman.


En 1990 NEW WORLDS produira de manière suicidaire la première adaptation Marvel de l’histoire avec THE PUNISHER. Loin des clichés auquel est malheureusement accolé depuis, la péloche arrive quelques heures après la réelle fin des années 80. Le film est à l’image de la carrière Lundgren. A savoir paumée dans ce laps temps infime qui sépare le culte de l’idiotie eighties pour beaucoup de candides bouffeurs de Netflix. Un simple quart d’heure trop tard pour se voir vénérer en réels stars de la pop-cultures tels que le sont Sly et Schwarzy à grandes échelles.

Pourtant tous les éléments liés à l’ambiance granuleuse de cette fameuse bobine CANON bon marché auquel Aliens le retour, Terminator ou Cobra n’ont pas échappé (une des raisons pour laquelle tous les films tournés en ratio 1:85:1 se ressemblent dans les années 80) : matraquages et pétages de gueules en règle qui forcent sévèrement le respect, scènes de vengeances hardcores, séquences de motos aux étages d’immeubles (délire sensiblement lié à cette époque), musique électro-baveuse-cuivreuses familières de ces productions aux punch-lines jouissantes de Boaz Yakin terrassant par uppercut n’importe qu’elle réplique de Sly. « - Frank, how do you call 128 murders in five years ?! - ...Work in progress… ». Bref, nous y sommes. En plein dedans. Et le bonheur est total.

Ci-contre, le génial Louis Gosset Jr dans une bien surprenante scène du métrage


Sorti quasiment aux mêmes instants que Double Détente ou Porté Disparu 3 de Norris, le public vint à croire que le Punisher version 1989 n’était qu’une énième daube réchauffée sans âme dont les gens finirent par détester suite aux bouleversements que fut Piège de Cristal du génial Mctiernan, dynamitant et surtout familiarisant le héros qui n’était alors plus en compétition pour mister univers. Le Punisher étant maladroitement présenté comme un ersatz écervelé sans volonté; arrivé aux stands en fin de course. 

Méprisé, mal aimé, c’est au travers d’une réputation putassière que le Punisher finira aux oubliettes du DTV et que ses atouts formellement modestes – à savoir sa morale déviante ainsi que sa dévotion totale pour son contenu – seront contraints de ne jamais être mis en avant. Un film qui ne cessera jamais d’osciller entre les décisions artistiques sombres d’un Mark Goldblatt alors en pleine bourre – monteur de l’hallucinante séquence finale de Mad Max 2 s’il vous plait et d’autres chefs d’œuvre tels que Starship Troopers – et les choix d’une mise en scène appartenant à un autre temps.

Le film - qu’on le veuille ou non - tord le cou à certaines idées reçues de l’époque. Là où le film fascine pour une raison X réside en son sein. The Punisher ne possède pas de protagoniste. Le principal antagoniste, c’est le Punisher et rien d’autre. Frank Castle est un grand malade bien dégénéré. Au sens propre et figuré du terme. Qui, avec son regard de flingué s’assoit des heures durant à poil devant des bougies; en pleine paranoïa psychotant sur le monstre qu’il devient. Un véritable allumé de la gâchette complètement pété, qui ne donne plus sens à sa vie et surtout sens à sa vengeance qu’il ne contrôle plus. En prouve les séquences entre son ancien collègue l'impeccable Louis Gassett Jr. et un Dolph Lundgren. Ce dernier en devient quasiment troublant et littéralement habité par le rôle qu’on le veuille ou non, qu’il teinte d’une noirceur qui ne sera jamais égalé dans ce style typiquement eighties. Et c'est sur ce point que le métrage force le respect.


En outre seul James Cameron s’était permis une version aussi pessimiste d’une figure de héros avec Mickael Biehn en Kyle Reese lors du premier épisode suicidaire de la saga robotique. Pour l’anecdote, le lien entre ces deux films vient de James Cameron, véritable artisan du cinéma qui fit ses armes à la fin des années 70 chez Corman en tant que réalisateur des effets spéciaux sur de nombreux films (et aussi chez John Carpenter sur New York 97 ! L’aéroplane trop classe de Snake Pliskenn, c’est lui SVP !)

Balafré, souffrant, obsédé de noirceur, le Punisher ne possédera jamais l’aura d’un stupide Iron-Man Le comic déjà à l’époque dépeignait sans cesse la morale très discutable d’un antagoniste toujours plus en proie à ses démons. Et le film de Goldblatt n’immortalise que cette simple et unique idée derrière une armada de codes appartenant à son temps. Rien de plus, rien de moins. Une époque où les studios d’ailleurs n’obligeaient pas encore à ménager des blagues pour gamins ou parents immatures. En avance sur son temps le Punisher ? Non, jamais de la vie. Bien au contraire, les deux pieds dedans. Mais force est de constater que le film propose modestement une lecture néo-noir trop rare pour l'époque.

Lorsque – en 1992 – les un-peu-trop cokés des Nuls décident d’en réaliser un pastiche pas drôle dans le cadre de leur émission. Lundgren joue alors le jeu reprenant son rôle sous les traits de Pleunicheur...On repassera sur la difficulté de la pseudo-blague pour se concentrer sur l’important : Lundgren jouera effectivement le jeu pour canal, mais clairement à contre-cœurs. Car The Punisher est le rôle de carrière. En outre l’acteur souhaitait prouver en son temps qu’un rôle de personnage intimement lié à la pop culture pouvait être cacheté de rôle de composition au sein d’un film genresque de son époque. En prouve l’hallucinant climax qui par son image-tableau explosive (l’anti-héros supplie un mioche de lui tirer une balle dans la tête pour en finir avec ses démons…quand même !). Le genre de séquence destinée aujourd’hui à la censure.


Lundgren joue corps et âme 90 minutes durant dans une relecture très coupable. Visionnaire ? Il ne faut peut-être pas se foutre de la gueule du monde et vendre le rôle du siècle. Passionné, totalement. 

Complètement anarchiste et réac à l’instar de sa péloche, Goldblatt prend un malin plaisir à saloper l’american dream dans un film ne souhaite pourtant jamais s’inscrire dans le politiquement incorrect. Le film est tel qu’il est : sans aucune prétention, avec ses armes et ses moyens. Goldblatt avouera ne jamais avoir eu aucun problème avec le montage final de son film (mis à part le shot final), qui armé d’une simplicité farouche s’approprie les codes de l’exploitation Hong-Kongaise et néo-noir de l’époque pour y rédiger les lettres d’adieux de ce genre. Malgré tout, le film appartient déjà au passé le jour de sa sortie.

Nul ne peut être incertain du fervent capital sympathie apporté au film avec le temps. Et renier ce paramètre très mais alors très coupable serait clairement contre-objectif si l’on en venait à comparer simplement The Punisher à n’importe quel classique de l’histoire du cinéma.

                          Scène capitale du film, éclairant la réelle volonté du duo Goldblatt / Lundgren


Tout ça pour en revenir à une question phare auquel nous n’avons pas encore eu de réponse : qu’est qu’un bon film ? Est-il celui qui répond aux propos empiriques du cinéma - à savoir ses défauts inexistants, qui par sa qualité tant intellectuelle ou technique brille ? Ou s'agit-il de celui qui au-delà ses défauts, son origine, son but, reste mystérieusement attachant et fascinant malgré ses immenses défauts ? La vérité est ailleurs. Chez X-Files précisément.

Telle est la question qui demeure encore aujourd’hui pour cette catégorie d’invraisemblables films auquel le Punisher de Goldblatt fait partie en tête de classement. L’histoire compliquée de cette question résume en tout est pour tout l’univers fascinant de ces films dont on ne sait que penser. Ces films qui sont adorés pour d'évidentes raisons, mais aussi d'incompréhensibles motifs. Ces films; qui par leurs volontés d’offrir le meilleur d’eux-mêmes s’entourent de fanatiques prêts à les défendre corps et âmes. Ces films; souhaitant se délivrer du mal absolu d’une autre éternelle question : un film est-il par définition politique ? 

Généralement considéré comme l’un des pires films de super héros de l’histoire – mais avez-vous vu le-putain d’énième Avengers bordel ? – le Punisher n’a jamais eu véritablement le droit de se faire un petit nom ou de prouver simplement ce qu’il était.  Le jugement fut sans appel et sans défense. Détesté dès la première à la dernière seconde par une horde de misérables méprisant l’incroyablement attachant cinéma bis. Et oui Yannick Dahan, je parle aussi de toi et de ta horde. D’ailleurs tu l’as vu ton film la horde ?

En 2016 Jérémie Damoiseau écrit « Punisher L’histoire Secrète » livre retraçant les coulisses de cette entreprise oubliée. Une véritable déclaration d’amour à une ère révolue et à ce film qui ne cesse de fasciner tant par l'évidente noirceur dépeinte que son ambiance d’un autre temps. Cosmiquement incompréhensible, définitivement mémorable.



Commentaires

  1. Ta troow raison papa a côté le batman de nolan c'est de la bouse , signé jacky le panda . M1i
    Ps : j ai plus de go internet depuis la semaine dernière ca serait bien que tu paies ma facture sfr au lieu de te payer des bières a lidl .
    ( dsl le seul batman à mes yeux restera ben affleck ..)

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